14. Qui a le droit de se présenter comme prof de tango ? par Liliane et réponse de Claire

Bonjour Claire,

je me présente : Liliane, (7 ans de tango assidûment) nous nous sommes rencontrées il y a 2 ou 3 ans au festival de Lille, j'étais avec [... anonymat...], et je m'occupais de la com et de l'événementiel de l'asso Metz VilleTango dont j'avais été présidente pendant un an; j'ai organisé plusieurs grandes soirées et la plus mémorable qui ne remporte pas les suffrages de bon nombre de tangueros fut en juin 2006, lors de la demi-finale française régionale du championnat de BsAs : beau score : plus de 250 personnes, surtout du grand public non tanguero grâce à une publicité efficace. Le but : réveiller les Lorrains, les sensibiliser, leur faire partager cette belle passion, et surtout avoir des tangueros à Metz !!!

voilà, tu sais qui je suis.

Pour ce qui nous préoccupe, je ME et VOUS pose des questions:

QUI A LE DROIT DE SE PRESENTER COMME PROF DE TANGO ?

Sérieux dilemne, non ?

Je m'insurge contre le nombre de danseurs qui surgissent ça et là et qui ont la prétention de s'instaurer professeurs de tango et d'enseigner alors qu'ils n'en ont pas les compétences.

Par ailleurs, autant que je sache, tous les danseurs que nous connaissons, donnent des cours, se présentent comme professeurs, de quel droit ? sur quels critères ? par qui ont-ils été reconnus ? accrédités par qui, par quoi ?

Si les danseurs ne font pas de concours, s'ils ne GAGNENT pas de concours, comment peuvent-ils se faire connaître ? Quels sont les critères de compétences ?

Encore que, être bon danseur n'implique pas automatiquement que l'on soit bon pédagogue et inversement ! et nous en connaissons!

J'avais entendu qu'il y avait une université du tango à BsAs, qu'en est-il ?

Il existe de par le monde des conservatoires de musique et de danse, pourquoi n'y aurait-il pas l'équivalent pour le tango ?

Pourquoi pas une université du tango, qui ferait autorité, qui siègerait une fois par an, avec un jury composé des bons danseurs reconnus actuellement, pour faire passer des épreuves à l'échelon national aux candidats au professorat (comme le CAPES ou l'Agregation). Je verrai bien un examen d'aptitude à l'enseignement qui pourrait s'appeler Diplôme d'Aptitude à l'Enseignement du Tango Argentin (DAETA) où seraient jugées la technique, l'esthétique, l'élégance, l'imagination, l'originalité, que sais-je encore ...les connaissances de la culture du tango...la musicalité, les orchestres, etc. un peu comme le patinage artistique.

C'est une solution pour éviter les abus et les imposteurs, qu'ils soient français ou argentins, solution à réaliser avec des spécialistes du tango et non imposée par un ministère qui n'y connaît rien ou influencé et/ou sous la pression de lobbies magouilleurs qui cherchent à s'enrichir !

Voilà chère Claire le fruit de ma réflexion, je ne sais si cela fera avancer le schmilblick ...

j'attends des réponses; à bientôt, bises, Liliane

Chistophe: j'ai dansé avec toi à Metz au Centre Commercial St Jacques et tu m'as donné un cours particulier - j'étais débutante - et cela m'a permis de faire un sacré bond !

-------- Réponse de Claire Prouhet, 10/02/2008 15:06 ---------

merci Liliane,

Je te réponds à titre personnel sur la plupart des points :
Oui il y a pléthore d'apprentis danseurs qui à peine sorti du giron d'un prof, s'autoproclament "prof " à leur tour.
Mais on peut rétorquer à cela que c'est l'élève qui choisit son maitre : cette liberté de choix donne aussi une part de responsabilité à l'élève puisque celui-ci a de multiples offres et qu'il peut élire celle qui lui correspond le mieux. Cela est vrai pour les débutants, car ensuite, tu dois l'avoir expérimenté, les choses se complexifient !.De fil en aiguille , l'univers infini du tango s'ouvre à lui, et il décourvre les stages, les profs venus d'ailleurs, les maestros, les orchestres, les publications, les Cd, les chaussures, l'histoire de cette danse, le réseau d'associations, les bals dans tous les coins de France et d'Europe, les festivals, et s'il ne tombe pas dans la pratique tango addictive, du moins il devient comme chacun de nous un "mordu", curieux, itinérant, et sans oeillère ! (je mets tout en vrac exprès, cela peut partir dans tous les sens !!) et il ira ensuite à Buenos Aires, et etc, etc.. Et plus il progressera dans le tango, plus il deviendra difficile, saura se qu'il recherche, et choisira ses profs !
Donc au final qu'il y ait quelques incapables qui enseignent ne nuit qu'à ceux qui les choisissent car en principe, on ne reste pas quand le cours est mauvais !! et cette danse n'a aucune exigence physique, elle ne cause pas de dommages au corps donc il n'y a pas trop de danger si elle est enseignée par un mauvais danseur ! faisons donc preuve d'intelligence à cet égard !
S'il faut mettre de l'ordre quelque part, allons plutôt voir du côté des fausses associations, du travail au noir, des non-déclarations à la Sacem, des magouilles comptables.. là oui, il y a du travail de "nettoyage" pour que le fonctionnement soit plus clean, et n'autorise pas la tricherie qui elle-même encourage les fausses vocations !!

Par contre je continue à plaider pour les fondements mêmes du tango : populaire, initiatique, et universel : transmission orale, multiplicités des approches, paysage d'une intense richesse qu'un diplome ne peut que détruire, s'il n'est qu'une sanction basée sur une pseudo maitrise technique de la danse
Tu compares à la musique ?? eh bien justement les musiciens qui apprennent à jouer le tango doivent faire le même parcours : rien n'est écrit, codifié, ils doivent faire leur apprentisssage avec des maestros encore vivants pour pouvoir capter tant qu'il est encore temps les "secrets" de l'interprétation tango, les spécificités de chaque style, et ils n'apprennnent jamais avec un seul prof ! Plus ils diversifient leur apprentissage plus ils sont capables de jouer dans tous les styles et d'en dégager un qui sera leur propre style !

Ne pas oublier qu'il y a aussi un nombre plus grand de gens qui ne prennnent pas le titre de prof (souvent c'est les élèves qui le leur impose) et qui sont juste des "passeurs" de tango bénévoles ou défrayés et qui contribuent à la transmission d'une danse qui depuis 1 siècle a produit d'immenses danseurs, de grands maestros qui a leur tour ont appris à d'autres pour que jamais ne s'arrête cette transmission vivante, qui échappe à notre pensée rationnaliste et scolaire !

Qu'il y ait beaucoup de gens contre les concours c'est compréhensible car cette danse échappe aux caractéristiques des danses standard de compétition, mais tu as raison de souligner que cela fait aussi marcher la pub et la promotion de cette danse ! à condition que cela reste un évènement sans volonté d'en faire une institution comme dans la danse de salon ! Buenos Aires a son Mundial de tango, et cela est vécu comme un évènement parmi d'autres, sans intérêt particulièrement dominant dans tout ce qui se passe là-bas, sans prétention d'être un évènement référent dans cette ville ou le tango a une telle vitalité et liberté que personne ne peut se l'approprier !

Je pars dans quelques jours à Buenos Aires, et justement je vais m'informer sur les "voies" de formation qui se mettent en place là-bas sachant par avance qu'il n'existe RIEN de reconnu non plus et pour cause en Argentine ! excepté pour les touristes qui ont besoin de revenir avec un diplome.. acheté !!
Il y a très peu de Maestros reconnus mondialement qui ont fait la preuve de leur capacité à conceptualiser le tango, à l'apprendre avec une analyse et exhaustivité rares , qui ont déjà formé de nombreux danseurs devenus professionnels : je pense surtout à Gustavo Naveira (il a parmi ses élèves qui se revendiquent de son "école" : Chicho, Sebastian Arce, Pablo Tegli, Federico Moreno, Esteban Moreno ... et des dizaines d'autres.. qui sont jeunes et plein d'avenir... En fait quel prof de tango professionnel à l'heure actuelle peut s'être dispensé de passer entre les mains de Gustavo Naveira ??? Tous y ont gouté, tous ont fait ses séminaires, tous reconnaissent sa supériorité pédagogique ) Peut-être arrivera t'il à ouvrir vraiment une ECOLE de tango avec son estampille, pour le moment il continue à enseigner commel'ont fait ses "pères" par la voie du libre consentement des élèves, sans diplome à la clef !

voilà ce que je peux répondre avec ma petite expérience

Claire
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